Je l’ai observée, cette femme, dans l’obscurité solennelle du Temple. Une ombre frêle, insignifiante, qui osait troubler la liturgie de mes pensées. Elle s’avança, hésita un instant, puis glissa deux pièces de cuivre dans le tronc. Un geste banal, insignifiant, si ce n’est que mon regard, aiguisé par l’ennui, s’y accrocha.
Deux pièces de cuivre. L’équivalent d’un pain rassis, d’une poignée de légumes. Un rien, pour moi. Pour elle, peut-être tout ce qu’il lui restait. Dans son geste, j’ai senti une force incommensurable, une foi qui m’a ébranlé. Elle donnait tout, absolument tout. Tandis que moi, je comptais mes offrandes, je les pesais, je les négociais avec Dieu.
J’ai pensé à Jésus, qui contemplait cette scène avec une indulgence amusée. Lui, le Fils de l’Homme, le Roi des Rois, et cette femme, la plus pauvre de ses sujets. Elle, qui lui offrait son tout, tandis que nous, les riches, les puissants, les savants, nous ne lui donnions que des miettes.
Et puis, une question s’est imposée à moi : qui était le plus riche ? Elle, dans sa pauvreté absolue, ou moi, dans ma richesse ostentatoire ? Qui était le plus proche de Dieu ? Elle, dans sa foi simple et profonde, ou moi, dans ma religiosité de façade?
En cette offrande, il y avait plus que de l’argent. Il y avait la foi, la confiance absolue en un Dieu qui voit au-delà des apparences. Une foi que je n’ai jamais connue, moi qui me suis toujours caché derrière mes richesses, derrière les murs épais de mon hypocrisie. J’étais le pauvre, le misérable, l’aveugle. Et elle, la riche, la bienheureuse, la voyante.
Dans ce Temple, où régnait l’opulence et la vanité, cette femme m’a donné une leçon d’humilité. Elle m’a rappelé que Dieu ne regarde pas à la quantité, mais à la qualité de nos offrandes. Que le véritable culte ne se mesure pas à l’épaisseur de notre porte-monnaie, mais à la sincérité de notre cœur.
Cette veuve, dans sa pauvreté, m’a rendu riche. Elle m’a montré le chemin de la vraie vie, celle qui ne se mesure pas en pièces d’or, mais en actes d’amour. Elle m’a appris que le plus grand don que l’on puisse faire, c’est de donner tout ce qu’on est et j’ai compris que je devais tout recommencer.
L’offrande du coeur
